The Secret Life of Happy People Affiche de film

The Secret Life of Happy People

La Vie secrète des gens heureux

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Critique

Alan Ball. C’est le nom qui me revenait sans cesse en tête en voyant le premier film de Stéphane Lapointe, La Vie secrète des gens heureux. Ball est le scénariste derrière American Beauty et le créateur de la série Six Feet Under. Le film de Lapointe évoque sans aucun doute une très forte « vibe » à la Alan Ball, avec son mélange d’humour et d’amertume. Et c’est très bien comme ça.

Dans l’intérêt de l’honnêteté intellectuelle totale, je dois vous mentionner que j’ai brièvement travaillé avec Lapointe, il y a plusieurs années, alors que nous oeuvrions tous deux pour l’émission de radio La Jungle à Québec. Ceci dit, nous ne sommes ni amis ni de grandes connaissances. Nous nous sommes croisés de temps à autre, tout au plus. J’ai donc vu son film comme je verrais tout autre film, sans préjugé favorable ou défavorable. Voilà pour la mise au point.

Le film raconte une période dans la vie de la famille Dufresne, famille qui en apparence a tout pour être heureuse, sauf peut-être un fils, Thomas, qui ne colle pas très bien avec le reste de la famille. Tout le monde a bien réussi dans la vie, sauf Thomas, qui peine à terminer ses études en architecture (un choix de papa bien sûr), n’a pas de blonde et très peu d’amis. La vie de tout ce beau monde va basculer avec l’arrivée d’une jeune femme, Audrey Marion, dans le décor.

À travers cette famille aux apparences saines, Lapointe peut toucher à de nombreux aspects de nos vies : la passion sous toutes ses formes, le manque d’écoute et de compréhension des autres, les aspirations des parents imposées aux enfants, et j’en passe. La beauté du scénario est qu’il passe ses messages en douce, sans taper sur la tête de personne et surtout sans oublier de divertir.

Si les vieux routiers Gilbert Sicotte, Marie Gignac, Marc Paquet et Anne Dorval s’acquittent admirablement de leur tâche, c’est surtout à la nouvelle venue Catherine De Léan qu’on s’attardera. Cette jeune première, qui rappelle physiquement Audrey Tautou (Amélie), commande l’attention à chacune de ses apparitions dans la peau d’Audrey (tiens tiens), celle par qui le chaos s’installe (ou se révèle plutôt). Une nouvelle actrice à surveiller.

Lapointe, qui signe le film tant dans la réalisation que le scénario, nous offre donc une étude familiale pleine d’humour, de sensibilité et d’observations savoureuses. Si les blagues ne sont pas toujours « réalistes » et donc nous rappellent que nous sommes au cinéma et non dans la vie de véritables personnages, les travers des principaux personnages sont assez vrais pour qu’on y reconnaisse des gens de notre entourage. Il n’y a d’ailleurs nul doute que le personnage de Thomas est l’alter ego du jeune réalisateur.

Oublions le caractère légèrement « déjà vu » de la mise en scène (même la musique rappelle Thomas Newman, compositeur de Six Feet Under et d’American Beauty) et le manque de réalisme de certains passages (Lapointe semble hésiter entre la fantaisie pure et le réalisme à de nombreuses occasions) pour dire que La Vie secrète des gens heureux est le premier film d’un nouveau cinéaste sensible, fait pour gens sensibles.

par Nicolas Lacroix
vu en version originale québécoise

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