L'échange (2008) Affiche de film

L'échange (2008)

Changeling

  • Date de sortie: vendredi 31 octobre 2008
  • Genre: Thriller

  • Réalisateur: Clint Eastwood
  • Producteur: Brian Grazer, Ron Howard, Rob Lorenz, Clint Eastwood
  • Scénario: J. Michael Straczynski
  • Studio: Universal Pictures
  • Durée: 2h 22m
  • Site officiel: www.changelingmovie.net
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Critique

Maman avant tout, Angelina Jolie continue – pour l’instant du moins – à faire du cinéma. Depuis quelques années, la star alterne habilement les films d’action explosifs et les poignants drames. Les femmes qu’elle campe sont toujours fortes, mais livrent des combats bien différents. Cette année encore, elle nous a montré à quel point elle savait se défendre à l’aide d’un revolver grâce au long métrage Wanted/Recherché. Elle enchaîne donc maintenant en nous prouvant à quel point elle peut se défendre avec pour seule arme la persévérance. Pas de doute, le scénario de Changeling/L’échange était écrit pour l’actrice. Mais ce n’est pas tout de mettre l’histoire entre les mains d’un réalisateur lauréat d’Oscars comme Clint Eastwood. Encore faut-il que ce dernier soit en mesure de donner au récit ce qu’il mérite pleinement.

Mère monoparentale, Christine Collins vit avec son fils Walter à Los Angeles. Nous sommes en 1928 et le récit qui suit est inspiré d’une histoire vraie. Appelée à remplacer une collègue au travail, Christine quitte le domicile familial en laissant seul son garçon. À son retour en soirée, il a disparu. Malgré des recherches dans le voisinage et des appels répétés aux policiers du LAPD, Walter ne revient pas. Quelques mois plus tard, les agents de la paix viennent l’aviser que son fils a été retrouvé. Or, elle constate avec stupéfaction que ce n’est pas Walter. Mais le LAPD a besoin que Christine corrobore l’information. Même si elle accepte, Christine n’abandonne pas sa lutte, malgré les réticences des autorités policières.

Changeling/L’échange est déjà la septième réalisation de Clint Eastwood à voir le jour dans les années 2000. Jusqu’ici, le cinéaste a prouvé qu’il avait un faible pour les histoires de courage et de combativité. Il y a quatre ans, c’est la ténacité de Maggie Fitzgerald, la boxeuse de Million Dollar Baby/La fille à un million de dollars qui l’avait conquis. En 2008, il s’est découvert des affinités avec Christine Collins, cette femme à qui le capitaine de la police de Los Angeles a voulu faire gober que le petit garçon retrouvé était bel et bien le sien. Installé derrière la caméra avec un scénario solide, Eastwood aurait encore une fois pu propulser le film vers la cérémonie des Oscars. Or, même s’il propose une direction artistique intéressante et qu’il sait comment laisser parler les scènes, le cinéaste n’offre nullement le montage qui s’imposait. Il a de plus donné une trop grande latitude à des acteurs qui ne sont visiblement pas habitués à ce genre de pratique.

Après avoir vu toute la force du jeu dramatique d’Angelina Jolie dans A Mighty Heart/Un cœur invaincu, le choix de l’actrice dans le rôle principal ne faisait aucun doute. Sa joie de vivre est contagieuse, son professionnalisme est remarquable et sa persévérance n’a pas son pareil. Jolie passe par toute une gamme d’émotions qu’elle rend fort bien. Sa stature est imposante face à ce véritable barrage policier. John Malkovich a quant à lui hérité d’un rôle que tous les acteurs rêveraient d’avoir : un pasteur qui prend la parole à la radio pour dénoncer l’inaction des officiers du LAPD et révéler aux citoyens la corruption qui entoure leurs actions. Malkovich est survolté et – comme on pouvait s’y attendre – donne tout ce qu’il a. Tant mieux, car outre Colm Feore (qui joue encore un rôle de policier, décidément!) et Geoffrey Pierson (impressionnant) qui campe l’avocat de Christine Collins, le reste de la distribution n’a pas à se bomber le torse. Certaines mimiques sont exagérées, plusieurs regards se voulant perçants ratent de leur côté cruellement la cible. Mais c’est à Clint Eastwood – adepte des scènes tournées rapidement, trois prises maximum – qu’on doit une partie du blâme, car il aurait fallu mieux épauler les acteurs.

Incroyable mais véridique histoire, la triste réalité avec laquelle a dû composer Christine Collins regroupe presque tous les éléments pouvant servir à faire un film qui plaira à un vaste public. Écrit sans flafla par J. Michael Straczynski, le récit confronte le spectateur à plusieurs éléments troublants qui guettent tout bon citoyen : la disparition d’un enfant, le manque d’effectifs chez les autorités policières et la crainte de passer pour fou lorsqu’on diverge de l’opinion de la majorité. Malgré ces lourds sujets et les différentes frustrations qui en découlent, l’acharnement de cette mère et les quelques personnes croyant sa version a tout pour soulever les passions et amener à crier à l’injustice. Attendez d’entendre tout ce qu’on a dit à Christine Collins pour la dissuader de faire la lumière sur cette disparition…

Changeling/L’échange est un drame dans la plus simple expression du mot. Et dans l’une de ses pires cruautés. Il est par contre préférable de ne pas sombrer dans les règlements de comptes et la vengeance sanglante pour se faire justice. Clint Eastwood est tombé dans le panneau à quelques reprises, choisissant de montrer de manière horrifiante toute l’ampleur et la gravité des gestes posés par certains individus. Il a voulu tout montrer, tout raconter de peur qu’on ne comprenne pas. Pourtant, le combat de Christine Collins parle de lui-même.

Par Yan Lauzon

Vu en version originale anglaise.

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