Attablés au comptoir du bar McCool’s, trois hommes racontent comment ils sont tombés amoureux chacun de la même femme. Il y a là le barman Randy (Matt Dillon), son cousin avocat, Carl (Paul Reiser) et le détective Dehling (John Goodman). Tous les trois ont craqué pour la belle Jewel, tous les trois l’ont perdue mais chacun est convaincu d’avoir été le seul homme qui a vraiment compté pour elle. Jusque là, on nage en plein vaudeville (mais pas pour longtemps) et quand on saura que l’élue de leur coeur est incarnée par la magnifique Liv Tyler, personne ne s’étonnera plus qu’ils aient tous succombé à ses charmes.
   Là où ça se complique mais là aussi où l’histoire devient intéressante, le rire se faisant plus grinçant, c’est que le caractère et le comportement des protagonistes changent dépendamment de qui raconte son histoire… Ainsi quand Randy parle de Jewel, il décrit sa bien-aimée comme une jeune femme décidée avec qui il nettoyait de sa maison. En revanche, pour Carl, Jewel est une bombe sexuelle tandis que pour Dehling, elle n’était que douceur et innocence.
   Mais il n’y a pas que la belle Jewel qui change de personnalité d’une histoire à l’autre. Lorsque Dehling évoque ses souvenirs, Randy apparaît comme un psychopathetyrannique alors que lui est un sympathique défenseur de la loi. Inversement, quand Randy s’exprime, Dehling devient un flic miteux sans avenir!
   Rien donc n’est simple dans cette histoire et ce n’est pas l’arrivée de Mr. Burmeister, un tueur à gages (interprété par Michael Douglas) qui va clarifier le récit…
   Si Michael Douglas ne tient ici qu’un second rôle, c’est parce que sur ce film, il porte aussi la casquette de producteur. En effet, Un soir au bar McCool est produit par Furthur Films, la compagnie de production qu’il dirige avec Allison Lyon Segan et si cette bonne comédie noire a vu le jour, c’est lui qu’il faut remercier.
   Tout commença en 1999 lorsqu’il reçut le scénario d’un certain Stan Seidel. Bien que l’auteur soit un inconnu (c’est son premier script pour le cinéma), Michael Douglas lut le manuscrit et tomba aussitôt en amour avec cette intrigue complexe à l’humour noir et pas toujours « politically correct ».
   Convaincu de détenir une histoire en or, il se mit à la recherche d’un metteur en scène. Son choix se porta sur Harald Zwart, un jeune cinéaste d’origine suédoise qui a fait ses classes dans la publicité et le vidéoclip (Un soir au bar McCool n’est que son deuxième long métrage).
   Le réalisateur embauché, restait les acteurs à trouver et la belle àdénicher. Liv Tyler (Stealing Beauty, Armaggedon) ne fut pas longue à se décider car ce rôle lui permettait d’élargir son registre en abordant la comédie noire et en interprétant une jeune femme ambigüe aux multiples visages.
C’était aussi pour elle l’occasion de se mesurer à des partenaires talentueux et expérimentés. John Goodman compte 20 ans de carrière tant au cinéma (Le grand Lebowski des frères Coen) qu’à la télévision ( Roseanne et Normal, Ohio). Matt Dillon a tourné quant à lui sous la direction de Coppola, Van Sant et les frères Farrelly. Enfin Paul Reiser, alias Paul Buchman, nous fit rire sept années durant dans Mad About You.
   Le tournage se fit en huit semaines et demie dans les environs de Los Angeles durant l’automne 1999 et les premiers « screen tests », très prometteurs aux dires des producteurs, eurent lieu au printemps 2000.
   Un soir au bar McCool s’annonce donc comme un cocktail décapant et irrévérencieux, plein de surprises et de rires mais réservé à un public averti car il comporte des scènes de violence et de nudité et des dialogues parfois crus.
— Olivier Lefebure