Collatéral Affiche de film

Collatéral

Collateral

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Critique

Curieux comment l'été se transforme cette année d'un amoncellement de films insipides ou, à tout le moins, aux qualités divertissantes boiteuses, à une belle poignée de thrillers efficaces et démontrant une certaine intelligence. L'été cinématographique deviendrait-il l'automne? Après les aventures frénétiques de Jason Bourne et l'horreur politique du candidat Mandchou, le réalisateur Michael Mann nous offre un rare tour de Tom Cruise du côté des méchants dans Collatéral.

Max Durocher conduit un taxi lors du quart de nuit à Los Angeles. Son plus récent passager, un homme de belle apparence qui se prénomme Vincent, lui offre 600$ pour ses services comme chauffeur toute la nuit. C'est presque le double de son cachet habituel pour une nuit de travail alors Max accepte, sans se douter que Vincent est tueur à gages et qu'il devra le conduire vers ses cinq cibles avant 6 heures AM.

Voilà donc le point de départ d'un film que j'hésite à qualifier de film d'action. Car dans les mains de Michael Mann (The Insider), Collatéral devient un hybride plutôt fascinant de genres. La différence avec un film d'action traditionnel et un film d'action de Michael Mann est que l'action est l'aspect qui semble le moins l'intéresser (voir Heat). Ses films sont des drames préoccupés par les conflits intérieurs des personnages, ponctués par une externalisation occasionnelle de ces conflits sous forme de séquences percussives. Par exemple, la fabuleusement tendue scène dans une boîte de nuit bondée où trois équipes armées convergent pour s'affronter. Elle est tellement grandiose qu'on souhaiterait pratiquement que le film se termine là.

On retrouve donc dans Collatéral les marques de commerces de Mann, donc un cadrage très serré des visages, un esthétisme léché au maximum, des silences brisés de façon violente etc. Mann emploie ici deux directeurs photo, un pour le tournage des séquences en numérique et l'autre pour les séquences tournées sur film. Le grain de l'image alterne donc constamment entre un fini clair et coloré et un fini granuleux aux tons limités. Intéressant.

Niveau interprétation, le film appartient plus à Jamie Foxx, subtil et nuancé comme on ne l'a jamais vu auparavant, qu'à Cruise, professionnel mais pas nécessairement mémorable. Le personnage de Vincent est naturellement plus froid, plus calculateur tandis que Max doit passer par une gamme variée d'émotions et d'attitudes. Foxx sort donc gagnant du duel.

Collatéral est un suspense qui a de la classe, du style et de l'intelligence à revendre. Dommage que le film sombre dans les pires clichés du film de suspense lors de sa finale. En fait, les 15 dernières minutes du film sont à oublier. Une fois hors du taxi de Max, Collatéral perd les pédales et nous offre une poursuite tout droit sortie de Speed, ridicule et inexplicable. Cruellement décevant, mais pas assez pour effacer les qualités de tout ce qui a précédé ces 15 minutes.

par Nicolas Lacroix
vu en version originale anglaise

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